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Traire autrement pour mieux gérer les fortes chaleurs : une clé pour préserver ingestion, confort et performance

🔸 Introduction

Les vagues de chaleur estivales ne sont plus l’exception : elles deviennent la norme. Chaque année, les épisodes de fortes températures perturbent un peu plus la santé, le comportement et la production des vaches laitières.


Face à ce défi, on parle souvent d’ombrage, de brumisation ou de ventilation. Mais il existe une autre piste, souvent sous-estimée, et pourtant simple à mettre en œuvre : adapter les horaires de traite.


Car traire à 6 h du matin, c’est mobiliser les animaux au moment même où les conditions climatiques sont les plus favorables à l’ingestion. C’est leur faire perdre l’une des rares plages où elles pourraient pâturer confortablement, consommer efficacement, et préparer une bonne rumination.


Changer les horaires de traite, ce n’est pas simplement bouger des repères humains. C’est repenser l’organisation du troupeau en fonction de ses besoins biologiques, pour optimiser l’ingestion, réduire le stress thermique et sécuriser la production.


Dans cet article, on passe en revue trois stratégies concrètes pour adapter la traite aux périodes chaudes. Pas de miracle, mais des leviers simples, adaptables et éprouvés sur le terrain.

 


🔹 Partie 1 – Comprendre le pic de chaleur

Avant de chercher à adapter quoi que ce soit, il faut bien comprendre ce qu’on essaie d’éviter. Ce qu’on appelle communément un “pic de chaleur”, ce n’est pas seulement une sensation de chaud désagréable — c’est un stress physiologique mesurable, avec des impacts directs sur le comportement et la physiologie des vaches laitières.


Le principal indicateur utilisé pour objectiver ce phénomène, c’est l’indice THI (Temperature Humidity Index). Il combine température ambiante et humidité relative pour évaluer le niveau de stress thermique subi par les animaux. Chez les bovins laitiers, les premiers signes de stress apparaissent à partir d’un THI de 72, ce qui correspond à seulement 24 °C sous 60 % d’humidité.


tableau des valeurs THI

Mais ce n’est pas tout. L’effet thermique n’est pas instantané : la chaleur s’accumule dans le métabolisme de l’animal, d’autant plus s’il n’a pas eu de période de récupération fraîche entre deux pics. C’est pourquoi on observe souvent une augmentation de la fréquence respiratoire et de l’agitation plusieurs heures après le maximum thermique extérieur.


Dans la plupart des régions françaises, le pic thermique de la journée survient entre 15 h et 17 h, mais les effets négatifs peuvent s’étendre bien au-delà. À l’inverse, les créneaux les plus frais (et donc les plus propices à l’activité animale) se situent entre 4 h et 8 h le matin, puis après 20 h le soir.


👉 Autrement dit, tout l’enjeu consiste à éviter de mobiliser les animaux (déplacement, attente, traite) pendant les heures chaudes, et à valoriser les créneaux frais pour ce qu’ils sont : les meilleurs moments pour pâturer, consommer et ruminer.

 

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🔹 Partie 2 – Ingestion et rythmes naturels : l’herbe se consomme à la fraîche

Chez la vache laitière, l’ingestion n’est pas répartie de manière homogène sur la journée. Elle suit un rythme bien ancré, principalement piloté par la température, la luminosité et la disponibilité de l’herbe.


En période estivale, deux créneaux concentrent l’essentiel de l’ingestion :

  • Tôt le matin, entre 4 h et 8 h, lorsque les températures sont encore fraîches,

  • Et en soirée, entre 18 h et 22 h, quand la chaleur redescend et que l’humidité remonte.


Ces deux moments correspondent à une meilleure appétence de l’herbe, une ambiance plus fraîche, et une forte motivation alimentaire. Ce sont aussi les meilleures plages pour valoriser les paddocks les plus qualitatifs.


Mobiliser les animaux pour la traite pendant ces périodes revient à sacrifier l’un des deux principaux pics d’ingestion de la journée, avec un double effet négatif :

  • Moins d’herbe consommée,

  • Moins de repos et de rumination avant la montée en température.


👉 L’organisation des horaires de traite ne doit donc pas seulement chercher à éviter la chaleur, mais aussi à libérer les bons créneaux pour l’ingestion. Autrement dit : ce n’est pas parce qu’il fait frais qu’il faut traire. C’est justement parce qu’il fait frais qu’il faut laisser les animaux pâturer.


📊 Comparatif de trois organisations types 

Critère

Traite habituelle

Traite adaptée

Traite 1x/jour (Monotraite)

Horaires typiques

6 h–8 h et 18 h–20 h

8 h–10 h et 15 h–17 h

10 h–12 h

Disponibilité aux pics d’ingestion

Faible (mobilisation matin & soir)

Bonne (libération matin tôt et soirée)

Excellente (libération totale matin et soir)

Stress thermique

Élevé

Réduit

Très réduit

Organisation du travail

Standard

À adapter

Allégée mais spécifique

Impact sur la production

Pénalisée (ingestion contrariée)

Meilleure conservation

Baisse mais meilleure valorisation du pâturage

 

 

🔹 Partie 3 – Trois stratégies efficaces pour limiter l’impact des fortes chaleurs

Adapter les horaires de traite peut se faire de plusieurs façons, selon l’organisation du travail, les infrastructures disponibles et les objectifs du système. Il ne s’agit pas de copier un modèle unique, mais de choisir la stratégie la plus adaptée à son contexte. Voici trois approches concrètes, testées sur le terrain.


🟢 Scénario 1 – Adapter les horaires de traite (8 h–10 h et 15 h–17 h)


Dans cette configuration, on évite de traire pendant les périodes d’ingestion maximale (tôt le matin et en soirée), tout en restant dans des plages horaires acceptables pour le travail humain. Les animaux sont mobilisés en dehors des pics de pâturage, mais également avant les vraies pointes de chaleur (notamment l’après-midi).


Avantages :

  • Permet de libérer les moments les plus précieux pour l’ingestion.

  • Facile à mettre en place sans bouleverser totalement l’organisation.

  • Moins de stress thermique qu’avec une traite classique.


Points de vigilance :

  • Attention à la disponibilité en ombre et à la qualité des bâtiments en cas d’attente prolongée.


🟢 Scénario 2 – Traite une fois par jour (Monotraite, 10 h–12 h)


Passer en traite unique quotidienne permet de réduire significativement le nombre de déplacements et le temps passé en salle de traite. Placée en fin de matinée, cette traite évite de mobiliser les animaux aux moments les plus frais, ce qui maximise l’ingestion à l’herbe en matinée et en soirée.


Avantages :

  • Très bonne valorisation du pâturage (ingestion + rumination).

  • Allègement de la charge de travail.

  • Moins de stress thermique global.


Points de vigilance :

  • Nécessite une adaptation du travail.

  • Légère baisse de la production à anticiper, compensée parfois par une meilleure efficacité globale.


🟢 Scénario 3 – Repos en bâtiment et traite aux heures charnières (9 h et 14 h)


Cette stratégie repose sur un compromis intéressant : on traie en dehors des pics d’ingestion, puis on maintient les animaux au repos en bâtiment pendant toute la période de chaleur (de 10 h à 18 h), sans distribution de fourrage, simplement avec accès à l’eau, à l’ombre et à une ambiance ventilée.


L’objectif n’est pas de stimuler la production durant cette phase, mais de permettre aux animaux de récupérer et de ruminer dans des conditions optimales. Le retour au pâturage s’effectue en soirée, pour relancer l’ingestion au bon moment.


Avantages :

  • Rythme naturel respecté.

  • Réduction des coups de chaleur par mise au repos.

  • Facile à intégrer dans une organisation existante si le bâtiment est adapté.


Points de vigilance :

  • Nécessite un bâtiment tempéré, ventilé, bien aménagé.

  • Pas de distribution de fourrage à ce moment-là, sinon on ne parle pas d’adaptation au pâturage mais de transition.

 

 

🔹 Partie 4 – Clés de réussite & ajustements terrain

Mettre en place une nouvelle organisation de la traite en période chaude ne se limite pas à bouger deux créneaux dans le planning. Pour que ces adaptations soient réellement efficaces, elles doivent s’inscrire dans une réflexion plus large, centrée sur le comportement naturel des animaux, la logistique de l’exploitation et la réduction globale du stress thermique.


✅ 1. Réfléchir au déplacement, pas seulement à la traite


Ce qui fatigue et stresse une vache en période chaude, ce n’est pas uniquement la traite elle-même, mais tout ce qu’elle implique :

  • déplacement depuis le paddock (souvent sans ombre),

  • attente dans une zone bétonnée,

  • embouteillage en pré-fosse,

  • manque d’eau ou d’air frais à proximité.


👉 Optimiser les horaires de traite sans adapter le parcours, c’est rater la moitié du travail.


✅ 2. Sécuriser l’accès à l’eau… partout


Un changement d’horaire de traite, c’est aussi un changement de rythme de présence dans certaines zones (bâtiment, paddock d’attente, parc d’ombre, etc.). Il faut anticiper les besoins en eau dans chacune de ces zones :

  • abreuvoirs fonctionnels, propres, bien répartis,

  • pression suffisante,

  • accès simultané pour plusieurs animaux (débit global à surveiller).


✅ 3. Adapter l’ombre et la ventilation


Si l’on souhaite maintenir les animaux dans un bâtiment pendant les heures chaudes (scénario 3), la qualité de l’ambiance y est cruciale. Un bâtiment mal ventilé ou confiné peut faire pire que le plein air.


Pistes à considérer :

  • ventilation mécanique ou naturelle efficace,

  • orientation du bâtiment,

  • brumisation en complément,

  • espace au sol suffisant pour éviter la surdensité.


✅ 4. Penser flexibilité plutôt que rigidité


Les chaleurs estivales ne suivent pas un calendrier fixe. Une stratégie efficace repose sur la capacité d’adaptation du système :

  • pouvoir reculer ou avancer la traite selon les prévisions météo,

  • passer temporairement en monotraite si une canicule s’installe,

  • adapter le choix des paddocks pour favoriser l’ombre ou la proximité du bâtiment (possibilité de séparer les paddocks de jours (proches et ombragés) et les paddocks de nuit (plus loin et sans ombre).

 

  

🔹 Partie 5 – À retenir

Le stress thermique n’est pas une fatalité, mais il impose de repenser nos routines.

Les créneaux de fraîcheur sont rares et précieux : les occuper à traire, c’est empêcher les vaches d’en profiter pour ingérer.


🟩 Trois stratégies complémentaires peuvent être mises en œuvre :

  • Décaler les horaires pour libérer les bons moments d’ingestion.

  • Passer temporairement ou durablement en OAD.

  • Maintenir les animaux au repos en bâtiment pendant la chaleur.


Le succès de ces stratégies repose sur une approche globale : déplacement, abreuvement, ambiance, organisation du travail.


✅ Ce sont souvent des ajustements simples mais structurants, qui font toute la différence sur une série de journées chaudes.


 

🔸 Conclusion

Gérer les fortes chaleurs, ce n’est pas seulement réagir à la météo, c’est organiser le troupeau autour de ses besoins physiologiques réels.

Trop souvent, c’est notre logique de travail — bien plus que la météo elle-même — qui empêche les vaches de s’adapter.


Traire autrement, c’est leur redonner la liberté d’ingérer au bon moment, de ruminer au frais, et de produire dans de meilleures conditions.


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Merci d’avoir lu jusqu’au bout ! Si cet article vous a plu, partagez-le, commentez-le, et retrouvez les services Opti'pâture sur www.optipature.com.

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Joe Bailey
il y a 2 heures
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RAS !

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